Aides CAF : Lettre ouverte à la présidente de la CNAF

En tant que membres du Collectif Camp Colo, Toustes en Colo a adressé un courrier à la présidente de la CNAF pour alerter sur les procédures kafkaïennes des CAFs locales pour le financement des colos

Nous demandons une simplification et une uniformisation des politiques départementales de CAF sur les colonies de vacances.

Aides CAF : La situation de Toustes en Colo

En 2023, plus de 40% des jeunes accueilli·es sur nos colos ont pu bénéficier d’une aide au départ en vacances. 

L’envers du décors, c’est entre 200 et 300 heures de travail bénévole effectué par Thibaut, Nils et Mélina pour obtenir les conventionnements, estimer les aides en fonction des données, faire les demandes individuelles papier ou sur les intranet des différentes structures, à échanger des mails pour comprendre pourquoi tel ou tel dossier est bloqué, expliquer aux responsables pourquoi les procédures prennent du temps… Le tout, sans garantie que l’aide ne soit versée. Côté budget, nous avons avancé 15600€ afin que les parents n’aient pas à faire d’avance – Soit l’équivalent de 16 inscriptions. 

Nous pensons que ces aides au départ en vacances sont nécessaires et indispensables. Pour autant, de nombreux organismes ne proposent plus la gestion des aides CAFs aux responsable légaux faute de temps ou de fonds disponibles. Certains choisissent aussi de pratiquer des tarifs prohibitifs pour limiter le nombre de demande de prise en charge. Pendant ce temps, des entreprises se montent en proposant comme valeur ajoutée la prise en charge de ces conventionnements – et facturent jusqu’à 15% de frais et faisant ainsi monter les prix des séjours. Ce sont ces constats qui nous ont amené·es à participer à la rédaction de cette lettre ouverte.

Illustration de l'article Aides CAFs : un ado est paniqué devant un ordinateur

Aides CAF : L'action du Collectif Camp Colo

Le Collectif Camp Colo a adressé un courrier à la présidente de la CNAF Mme Isabelle Sancerni (CFTC) sur les procédures kafkaniennes des CAFs locales pour financer les colos et les départs en vacances des enfants et adolescent·es.
 
Le système est incompréhensible, impossible, inégalitaire, incohérent et couteux…
 
« VITE UNE REFORME »

Les aides CAFs : des politiques départementalisées

Les colonies de vacances relèvent des politiques publiques co-portées par l’Etat, les collectivités territoriales et les CAF. Une famille qui souhaite que son enfant puisse partir en colonie de vacances peut faire appel à des aides CAF.

Ces aides concernent les familles les plus en difficultés mais aussi et surtout les familles de classe moyenne. Ces familles qui gagnent trop pour avoir des prises en charge quasi complètes et pas assez pour avoir accès au marché des colos.

Comme organisateurs de séjours et militant·es, nous cherchons à construire des mixités sociales, de genre, géographique. Nous cherchons à permettre la rencontre entre enfants qui ne se croisent plus ailleurs qu’en colo : urbains/ruraux, des centres/des banlieues, des métropoles/ des villes moyennes. Et à ces titres, les aides CAF nous apparaissent comme le seul levier actuel.

Mais les choses ne sont pas si simples, les politiques des CAF sont départementalisées, chacune décide (via un conseil d’administration désigné parmi les partenaires sociaux et les associations familiales) de la répartition et des dispositifs choisis pour les fonds alloués. Les CAF locales suivent les directives de la CNAF mais organisent leurs priorités : 101 départements, 101 politiques. S’il est possible de comprendre que pour les animations de proximité une telle organisation a un sens, pour des politiques de vacances, elle devient une technocratie inégalitaire, discriminante, chronophage et coûteuse.

Aides CAF : une multitude de politiques différentes et autant de procédures de conventionnement

Les associations du Collectif Camps Colos (comme beaucoup d’organisateurs) tiennent à jour chaque année un tableau sur leurs propres conventionnements avec les CAF afin de permettre à chaque enfant d’allocataires de pouvoir partir sur les séjours qu’elles organisent. Ces tableaux sont publiés ou échangés pour faciliter le travail des plus petites associations.

Ce travail de synthèse devient un outil de service public tant la complexité règne. Entre les CAFs qui conventionnent directement, celles qui passent par le dispositif VACAF, celles qui utilisent l’aide temps libre ou celles qui ne répondent pas, il est impossible de comprendre. Il existe des CAF qui ne financent des vacances uniquement dans leur département, d’autres uniquement certains organisateurs ou à condition que le siège social soit dans le département… Enfin, certaines CAF réservent leurs aides à des partenariats locaux, ce qui revient à privatiser des aides publiques.

Bref, tout ceci ne permet ni aux familles de s’y retrouver, ni de répondre aux choix familiaux notamment sur ce que doivent être des vacances pour des enfants et des jeunes. Faut-il rappeler que toutes les colos ne se valent pas, et que, dès lors qu’un enfant s’éloigne de la norme, n’aime ni l’accumulation d’activité ni le sport ou souhaite partir avec un·e copain·e/cousin·e alors lui permettre de vivre une colo relève du parcours du combattant.

On passera sur les aberrations que produisent ces systèmes où les colos financées doivent se dérouler dans le département, où un enfant habitant à la frontière d’un département ne peut profiter d’une colo du département voisin, ou pire, lorsque l’aide financière n’est possible que pour quelques associations sélectionnées sur des critères inconnus. L’inégalité entre les différents enfants habitant en France est donc bien réelle.

Aides CAF : Une aide qui a un coût

Si on se place du côté des organisateurs, gérer la prise en charge des aides CAF, c’est mettre en place un suivi de plusieurs mois sans toujours de réel·les interlocuteur·ices pour conventionner avec 101 CAF. Dossiers différents, pièces à fournir, traitement numérique, envois papiers etc. sont la règle. Pour les petits organisateurs, il s’agit de mettre en place un secrétariat efficace qui a un coût. Accepter de recevoir des familles aidées, c’est payer pour elles.

Il s’agit ensuite de gérer les paiements, et de disposer de suffisamment de trésorerie pour encaisser les délais de paiement ou les erreurs administratives (changement des politiques par rapport à un précédent séjour, refus de conventionnement tardivement après l’inscription, etc). Dans la suite de crise sanitaire, il est bien difficile de croire que les trésoreries sont pleines et les crédits bancaires faciles à obtenir. Là encore, gérer des aides c’est dépenser et générer des coûts. Et bien évidemment, les CAF n’aident pas, n’apportent aucune aide financière à l’organisateur pour gestion administrative. Aujourd’hui et par militantisme, beaucoup de nos structures font ce travail bénévolement, s’entraident à comprendre et à remplir les dossiers, parfois s’appuient financièrement. D’autres organismes préfèrent quant à eux adopter des tarifs dissuasifs – limitant le nombre de dossiers à traiter.

Il est impératif de rappeler que l’ensemble des organisateurs du collectif défendent des colos inclusives et à l’accès universel. Dans nos colos, chacun·e vient comme iel est, chacun·e est respecté·e dans ses choix, ses origines, sa culture et ses manières de vivre en vacances. Nos colos accueillent des exclu·es ou des violenté·es des vacances, nos colos refusent les modèles pédagogiques violents et sexistes, nos colos refusent l’entre-soi construit sur catalogue en segmentant une offre via des thèmes et des activités excluantes. Notre action militante inclusive et universelle est empêchée par les fonctionnements de certaines CAF qui se referment sur leur unique territoire.

Un système complexe pour les responsables légaux

Si on se place du côté des allocataires, les règles sont incompréhensibles dès lors qu’il n’existe aucune souplesse ou que les règles s’appliquent uniformément. Comment comprendre des règles différentes dans un même bassin de vie partagé sur deux départements ?

Que dire de l’interface VACAF qui n’ouvre que fin février dans le meilleur des cas. Interface complexe, souvent incompréhensible dont on ne comprend pas les offres. Un tel dispositif devient excluant pour les plus fragiles soit il les exclue des offres de “réservation tôt”, les plus pauvres ne peuvent s’inscrire tardivement (notamment en raison de leur finance), soit il leur propose ce qui reste et ce qui n’a pas été pris par les autres… L’enjeu de l’inscription des plus vulnérables dans les colos et dans toutes les colos est de construire des mixités sociales, de genre, de territoire, de handicap, etc. Le dispositif VACAF est sa labellisation finit par construire des colos séparées.

Nos Demandes

Par cette lettre, nous demandons pour la politique des aides aux colonies de vacances des CAF :

– Que l’agrément donné par une CAF départementale vaille pour l’ensemble du territoire national

– Que les critères d’agréments soient connus de tous·tes, et que la commission d’agrément soit ouverte à tous les organisateurs.

– Que les politiques excluantes soient impossibles : territorialisation, liste fermée, partenariat exclusif, etc.

– Que les organisateurs soient aidés pour la gestion administrative des paiements et que des avances substantielles soient mises en place annuellement et dès le mois de mars pour l’été.

– Qu’une commission nationale sur les colonies de vacances soit mise en place avec l’ensemble des acteurs.

– Qu’une politique publique (basée sur un bonus/malus) sur l’accueil inclusif et universel puisse aider les colonies de vacances à évoluer (lieux, pédagogies et activités).

Portrzit d'un adolescent pour illustrer l'article sur les aides CAF

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